vendredi 15 juin 2007

FICHE DE LECTURE_ JEAN PIAGET

Hélène DELORME –N° auditeur : 18793
I – PRESENTATION DE L’AUTEUR


BIOGRAPHIE


Jean PIAGET (Jean William Fritz PIAGET) est né le 9 août 1896 à Neuchâtel en Suisse et mort le 16 septembre 1980 à Genève.


Ses parents…
Son père (Arthur PIAGET) était professeur de littérature médiéval. Il dit qu’il a appris de lui « la valeur d’un travail systématique même s’il porte sur des détails ».
Il disait de sa mère, Rebecca JACKSON « qu’elle était intelligente et énergique mais son tempérament plus névrotique rendait la vie familiale assez difficile ».
L’instabilité de sa mère eue pour conséquence que, très tôt dit-il, « je négligeai le jeu pour le travail sérieux, tant pour imiter mon père que pour me réfugier dans un monde personnel et non fictif ».
Ses premiers intérêts pour la psychologie l’ont conduit vers les problèmes de psychanalyse et de psychopathologie. Mais il dit qu’il a « toujours préféré l’étude des cas normaux et du fonctionnement de l’intelligence à celles des malices de l’inconscient ».


Son enfance…
Piaget fut un enfant précoce.
Entre 7 et 10 ans, il s’intéresse à la mécanique, aux oiseaux, aux fossiles et aux coquillages. A 11 ans, il écrit un court article sur un moineau albinos observé dans un parc.
En 1911, à 15 ans, après avoir eu des activités pendant 4 ans au Musée d’Histoire Naturelle de Neuchâtel, il publie une série d’articles sur l’étude des mollusques dans des revues à grand tirage. Dans le livre présenté dans cette fiche de lecture, il reprend d’ailleurs des études qu’il a mené plus tard sur les mollusques autour de l’inné et de l’acquis (1929) : « recherche sur les rapports de l’adaptation héréditaire avec le milieu à partir des linnéas stagnalis.


Ses études…
Après des études en sciences naturelles, Piaget soutien une thèse de biologie en 1918. Il part alors à Zurich pour travailler dans un laboratoire de psychologie.

En 1919, il se rend sur Paris pour suivre pendant deux ans des cours à la Sorbonne et assiste aux présentations de malades à l’Hôpital Sainte-Anne. Collaborant avec Janet, Il est chargé par le Docteur SIMON de standardiser les tests de raisonnement de Burt dans le laboratoire fondé par Alfred Binet. En conversant ainsi librement avec des enfants à propos des questions types du test de Burt, Piaget invente ce que sera la méthode clinique. Cette méthode est inspirée par la méthode expérimentale et la méthode d’interrogation clinique des psychiatres. Il l’utilisera toute sa vie en la faisant évoluer :
Ø Méthode clinique : méthode de conversation libre avec l’enfant sur un thème dirigé par l’interrogateur qui suit les réponses, suit les détours empruntés par la pensée, demande à l’enfant de justifier, d’expliquer, lui fait des contre suggestions.
Ø Méthode critique (évolution de la méthode clinique dans les années 40-50) : méthode de conversation libre avec le sujet mais les questions et les discussions ne sont introduites qu’à la suite ou au cours de manipulations portant sur les objets suscitant une action déterminée de la part du sujet.


Pendant ses études et expériences sur Paris, il découvre que la logique n’est pas innée et qu’elle se développe peu à peu.


En 1921, suite à la rédaction d’articles sur ses constats obtenus à Paris, il devient chef de travaux à l’institut de l’éducation Jean-Jacques Rousseau à Genève. Si à Paris, il observait principalement des enfants hospitalisés, il peut alors étudier l’enfant dans son cadre de vie « normal », notamment à l’école. Il pensait alors consacrer 2 à 3 ans à l’étude de la pensée enfantine pour revenir à l’étude de l’émergence de l’intelligence au cours des deux premières années. Ces quelques années vont lui prendre plus de 50 ans !
En 1923, il épouse Valentine Châtenay.


A partir de 1925, il enseigne la psychologie, la sociologie, la philosophie des sciences à l’Université de Neuchâtel.
1925 est aussi l’année de naissance de sa première fille. Il aura une deuxième fille en 1927 et un garçon en 1931. Par l’observation de ses enfants, Piaget va mener des recherches déterminantes pour la genèse des structures logiques. Dans le livre « Six études de psychologie » il fait d’ailleurs souvent référence à certaines de ces observations ou même d’expérimentations avec ses enfants.


Postes successifs…
1929 Professeur d’histoire de la pensée scientifique à l’Université de Genève.
Directeur du Bureau international de l’éducation
1932 Codirecteur de l’Institut Jean-Jacques Rousseau avec Edouard Claparède et Pierre Bovet
1936 Professeur de psychologie expérimentale
1939 Professeur de sociologie
Président de la Société suisse de psychologie
1940 Directeur du laboratoire de psychologie
1940/1950 publie beaucoup d’articles et de livre (particulièrement après la guerre)
1952/1963 Professeur de psychologie de l’enfant à la Sorbonne
1955 Fondateur du Centre international d’épistémologie génétique à Genève
1972 Quitte l’enseignement pour prendre sa retraite mais continue ses recherches et tient de nombreuses conférences.
BIBLIOGRAPHIE

La liste des travaux (articles, conférences, ouvrages…) de Piaget étant très longue, je ne présenterai ici qu’une sélection :

1907 Un moineau albinos (publié dans Le rameau de sapin vol 41)
1924 Le jugement et le raisonnement chez l’enfant (avec E. Cartalis)
1926 La représentation du monde chez l’enfant
1927 La causalité physique chez l’enfant
1936 La naissance de l’intelligence chez l’enfant
1937 La construction du réel chez l’enfant
1941 La genèse du nombre chez l’enfant (avec A. SZEMINSKA)
Le développement des quantités physiques chez l’enfant (avec B. INHELDER)
1942 Classes, relations et nombres (Essai sur les groupements de la logistique et sur la réversibilité de la pensée)
1945 La formation du symbole chez l’enfant
1946 Le développement de la notion de temps chez l’enfant
Les notions de mouvement et de vitesse chez l’enfant
1947 La psychologie de l’intelligence
1948 La représentation de l’espace chez l’enfant (avec B. INHELDER)
La géométrie spontanée de l’enfant (avec A. SZEMINSKA et B. INHELDER)
1949 Traité de logique
Essai de logistique opératoire
1950 Introduction à l’épistémologie génétique en trois tomes
1- la pensée mathématique
2- la pensée physique
3- La pensée biologique, la pensée psychologique et la pensée sociologique
1951 La genèse de l’idée de hasard chez l’enfant (avec B. INHELDER)
1952 Essai sur les transformations des opérations logiques
1955 De la logique de l’enfant à la logique de l’adolescent (avec B. INHELDER)
1958 La genèse des structures logiques élémentaires, classification et sériations (avec B. INHELDER)
1961 Les mécanismes perceptifs.
Epistémologie mathématique et psychologie (avec Evert W. Beth)
1964 Six études de psychologie
1965 Sagesse et illusions de la philosophie
1966 La psychologie de l’enfant (avec B. INHELDER)
1967 Logique et connaissance scientifique
1968 Le structuralisme
1970 L’épistémologie génétique
Psychologie et épistémologie
1974 Adaptation vitale et psychologie de l’intelligence : sélection organique et phénocopie
1975 L’équilibration des structures cognitives : problème central du développement
1976 Le comportement, moteur de l’évolution

II – PRESENTATION DU LIVRE : Six études de psychologie


Ce livre est paru pour la première édition en 1964 aux éditions Gonthier.

Il comprend deux parties.

1ère partie : Le développement mental chez l’enfant (étude parue en 1940).
Cette étude présente les découvertes essentielles de Piaget dans le domaine de la psychologie de l’enfant.

2ème partie :
Cette partie est constituée d’articles et de conférences parues entre 1954 et 1964 portant sur des thèmes centraux des découvertes de Piaget :
Ø La pensée du jeune enfant
Ø Le langage et la pensée du point de vue génétique (1954)
Ø Le rôle et la notion d’équilibre dans l’explication en psychologie (1959)
Ø Les problèmes de psychologie génétique (1956)
Ø Genèse et structure en psychologie de l’intelligence (1965)

Cet ouvrage présente donc les découvertes essentielles de Piaget en faisant référence très succinctement à des comptes-rendus d’expérience.
III – EXPOSE


Compte tenu de la richesse des contenus de chacune des études présentées dans ce livre, je porterai l’attention de ce rapport sur 4 points transversaux :

Ø Le besoin

Ø La notion d’équilibre

Ø La genèse de la pensée et le langage

Ø L’épistémologie génétique



III – 1 LE BESOIN


Dans son étude sur le développement mental de l’enfant, Piaget décrit 6 stades marquant l’apparition de structure progressivement construite :

Ø 1er: stade des réflexes, des premières tendances instinctives et des premières émotions

Ø 2ème: stade des première habitudes motrices et des premières perceptions organisées, des premiers sentiments différenciés

Ø 3ème: stade de l’intelligence sensori-motrice ou pratique, des régulations affectives élémentaires, des premières fixations extérieures de l’affectivité

Ø 4ème : stade de l’intelligence intuitive, des sentiments interindividuels spontanés et des rapports sociaux de soumission à l’adulte

Ø 5ème : stade des opérations intellectuelles concrètes et des sentiments moraux et sociaux de coopération

Ø 6ème : stade des opérations intellectuelles abstraites, de la formation de la personnalité et de l’insertion affective et intellectuelle dans la société des adultes

Les trois premiers stades correspondent à la période du nourrisson jusqu’à un an ½.Le 4ème se déroule dans la seconde partie de la petite enfance (2 à 7 ans), le 5ème de 7 à 12 ans et enfin le 6ème stade correspond à la période de l’adolescence.

Chaque stade constitue une forme particulière d’équilibre et l’évolution mentale s’effectue dans le sens d’une équilibration toujours plus poussée. Piaget décrit un mécanisme fonctionnel commun à tous les stades : toutes actions (mouvement, pensée, sentiment) répond à un besoin.

Claparède a montré qu’un besoin est toujours la manifestation d’un déséquilibre. La faim, par exemple, pousse à la recherche de nourriture.

Inversement, l’action se termine dès qu’il y a satisfaction des besoins, lorsque l’équilibre est rétabli entre le fait nouveau qui a déclenché le besoin et l’organisation mentale antérieure.

Les besoins (et intérêts) diffèrent selon les âges car ils dépendent de l’organisation du niveau concerné. Sans rentrer dans le détail du développement, Piaget dégage la forme générale des besoins communs à tous les âges.
Tout besoin tend à:

Ø incorporer les choses et les personnes à l’activité propre du sujet et donc à assimiler le monde extérieur aux structures déjà construites.

Ø réajuster ces structures en fonction des transformations subies, donc à les accommoder aux objets externes.

En assimilant les objets, l’action et la pensée sont contraintes de s’accommoder à eux. L’adaptation est l’équilibre de ces assimilations. L’accommodation est la forme générale de l’équilibre psychique. Piaget aborde le développement mental de l’enfant comme une adaptation, toujours plus précise, à la réalité par son organisation progressive.

On retrouve ici deux notions centrales de la théorie du développement de Piaget (assimilation et accommodation) abordées dans ce livre dans différents articles.



III – 2 LA NOTION D’EQUILIBRE. LES PROCESSUS D’EQUILIBRATION


Piaget étudie dans le détail la notion d’équilibre, évoquant les autres théoriciens l’ayant aussi utilisé dans l’explication des conduites :

Ø JANET dans la théorie des régulations affectives

Ø CLAPAREDE considérait le besoin comme l’expression d’un déséquilibre et la satisfaction comme l’indice d’une rééquilibration.

Ø LEWIN dans la théorie des graphs en psychologie sociale.

Le facteur d’équilibration est le facteur central du développement mental selon Piaget. Il dit « la tendance la plus profond de toute activité humaine est la marche vers l’équilibre ». Nous avons vu dans la partie précédente le rôle de la réponse au besoin dans le processus de construction mentale.

Piaget retient trois modèles d’équilibre applicables en psychologie. Je citerais ici les deux premiers modèles et développerais le troisième:

Ø Equilibre des forces au sein d’une structure de champ, l’équilibre se définissant alors par une balance exacte des forces.

Ø Modèle probabiliste pur utilisé par Ashby dans son étude sur la dynamique cérébrale

Ø Equilibre par compensation entre les perturbations extérieures et les activités du sujet.


Pour étudier plus précisément ce dernier modèle, rappelons tout d’abord deux notions importantes.

Une structure est un système stable et invariant, qui permet de garder en mémoire les actions.

La genèse est le passage d’une structure à une autre.
La transformation partant d’un état A et aboutissant à un état B, l’état B est plus stable que l’état A.

Toute genèse part d’une structure et aboutit à une autre structure. En psychologie de l’intelligence, quand on a affaire à une structure, on peut toujours retracer la genèse à partir d’autres structures plus élémentaires qui dérivent elles-mêmes par une genèse antérieure de structures encore plus élémentaires.
Toute structure a donc une genèse. Les structures, même les plus nécessaires (par exemple, les structures logico-mathématiques) ne sont pas innées chez l’enfant, elles se construisent peu à peu.

Genèse et structure sont donc indissociables. La relation entre genèse et structure s’explique par l’équilibre.


L’équilibre peut se définir comme une compensation des perturbations extérieures au moyen des activités du sujet constituant les réponse à ces perturbations.

Piaget décrit 3 caractères à l’équilibre :

Ø L’équilibre se caractérise par sa stabilité, ce qui ne veut pas dire immobilité. En effet, il s’agit de système d’actions mobiles et stables car la structure qui les détermine ne se modifiera pas une fois constituée.

Ø Tout système peut subir des perturbations extérieures qui tendent à les modifier. Il y a équilibre quand ces perturbations sont compensées par des actions du sujet orientées dans le sens de cette compensation.

Ø L’équilibre est donc essentiellement actif. Une structure sera en équilibre dans la mesure où l’individu est suffisamment actif pour opposer des compensations à toutes les perturbations. On peut faire ici une analogie avec la notion d’équilibre mental qui nécessite une force caractère pour résister aux perturbations.

Pour être complet, il faut introduire ici la notion de réversibilité. Piaget reprend les structures logico-mathématiques : une transformation logique peut être inversée par une transformation dans le sens contraire. Cette réversibilité est proche de la compensation dans le domaine de l’équilibre, lorsque les perturbations auxquelles répond le sujet peuvent comporter des modifications virtuelles. Les activités compensatrices consisteront alors à imaginer et à anticiper des transformations.

Les compensations répondant aux perturbations s’ajustent de manière progressive et aboutissent donc à une réversibilité opératoire. L’équilibre psychologique stable et final des structures cognitives se confond donc avec la réversibilité des opérations puisque les opérations inverses compensent exactement les transformations directes.
Lorsque les compensations ont été atteintes, c'est-à-dire l’équilibre obtenu, la structure est constituée en sa réversibilité même.





III – 3 LA GENESE DE LA PENSEE ET LE LANGAGE


Piaget le décrit la pensée du jeune enfant comme « un sujet que j’étudie depuis 40 ans sans en avoir encore fait le tour et que l’on peut aborder sous de multiples perceptives »

De 2 à 7 ans, on assiste à une transformation de l’intelligence sensori-motrice (ou pratique) en pensée proprement dite sous l’influence du langage et de la socialisation.

Grâce au langage, l’enfant peut évoquer des situations non actuelles, c’est à dire reconstituer ses actions passées sous forme de récit et anticiper ses actions futures. Il se libère des limites du champ perceptif (espace proche, le présent) alors que l’intelligence sensori-motrice était presque entièrement à l’intérieur de ces limites. C’est le début de la représentation.

Parallèlement, grâce au langage, les objets et les événements sont insérés dans un cadre conceptuel et rationnel qui enrichit la connaissance. Ils ne sont plus seulement atteints dans leur immédiateté perceptive. C’est le début de la schématisation représentative.


► On peut dire alors que le langage est la source de la pensée.


Mais chez le petite enfant, on trouve à côté du langage un système de signifiant plus individuel : les symboles. On découvre les formes les plus courantes dans les jeux symbolique, les jeux d’imitation et les jeux d’imagination (exemple : jeux de poupées, dînette….)

Le jeu symbolique constitue une activité réelle de la pensée mais essentiellement égocentrique.
Le jeu constitue la forme d’activité initiale, ou tout au moins d’exercice, que l’on retrouve à chaque stade. On peut observer bien avant l’apparition du langage un jeu des fonctions sensori-motrices qui est un jeu de pur exercice, sans intervention de la pensée ni de la vie sociale, puisqu’il n’actionne que des mouvements et des perceptions. Plus tard, vers 7-12 ans, la vie collective fait se constituer des jeux de règles communes. Entre ces deux périodes, on trouve le jeu symbolique qui fait intervenir la pensée mais en tant que pensée individuelle pure avec très peu d’éléments collectifs. Il apparaît donc à peu près en même temps que le langage mais indépendamment de lui.
Sa fonction consiste à satisfaire le moi par une transformation du réel en fonction des désirs, autrement dit une assimilation déformante du réel au moi.
Par exemple, un enfant qui joue à la poupée refait sa vie, revit ses plaisirs ou ses conflits, les résout, en compensant la réalité par la fiction.
Si le langage intervient dans cette sorte de pensée imaginative, c’est avant tout l’image ou le symbole qui en constituent l’instrument. Ce symbole est un signe individuel, élaboré par l’individu et souvent compris de lui seul puisqu’il se réfère à ses propres souvenirs.


► Il existe donc une fonction symbolique plus large que le langage.
La source de la pensée est à chercher dans la fonction symbolique.


Le langage n’est qu’une forme particulière de la fonction symbolique. Comme le symbole individuel est certainement plus simple que le signe collectif, on peut conclure que la pensée précède le langage. Celui-ci se borne à la transformer profondément en l’aidant à atteindre ses formes d’équilibre par une schématisation plus poussée et une abstraction plus motivée.

III – 4 L’EPISTEMOLOGIE GENETIQUE


Dans certain cas, l’étude génétique de la construction des notions et des opérations permet de répondre à des questions posées par les sciences en ce qui concerne leurs procédés de connaissance. La psychologie de l’enfant se prolonge alors en « épistémologie génétique ».

Piaget donne un exemple significatif et même fondateur : le temps et la vitesse.
En 1928, dans un congrès de philosophie des sciences, Einstein lui pose la question de savoir si psychologiquement, la notion de vitesse se développe en fonction de celle du temps ou si elle peut se constituer indépendamment de toute durée et même primitivement à celle de la durée.
Dans la mécanique classique, la notion de vitesse dépend de celle de la durée. Du point de vu des relativistes, c’est au contraire la durée qui dépend de la vitesse. Piaget et son équipe ont donc tout d’abord étudié la notion de temps chez le jeune enfant puis la notion de vitesse. Ces travaux feront l’objet de son ouvrage « les notions de mouvement et de vitesse chez l’enfant » paru en 1950.

Les résultats de leurs recherches ont été utilisés par deux physiciens français dans leurs travaux sur le point de départ de la théorie de la relativité aboutissant à un théorème d’addition des vitesses.

A travers les différentes recherches qu’il a menées sur la construction de la connaissance chez l’enfant, il a mis en évidence :
Ø Qu’elle se construit progressivement
Ø Quelle évolue tout au long de la vie en passant par différentes étapes avant d’atteindre le niveau de l’adulte.

Mais c’est aussi par l’étude de la pensée du jeune enfant qu’on peut apporter des résultats positifs qui nous enseigne sur le mode de construction des structures rationnelles et nous permet d’éclairer certains aspects obscurs de la pensée scientifique.

Piaget a donc construit l’épistémologie génétique par l’étude de l’évolution de l’intelligence depuis la petite enfance, en faisant l’hypothèse d’un parallèle entre les processus d’élaboration de la connaissance individuelle et les processus d’élaboration collective.


IV MISE EN PERSPECTIVE ET ACTUALISATION


Les différents thèmes abordés dans le livre et repris dans cette fiche ont fait l’objet de nombreuses recherches, critiques ou avancées. Sans pouvoir reprendre l’ensemble des critiques ou apports aux théories de Piaget, je présenterai ici quelques points fondamentaux.

Ainsi, nous avons vu dans la biographie de Piaget la description de sa méthode d’interrogation clinique qui venait en complément de ses expériences. De nouvelles méthodes d’investigation ont permis d’aller plus loin dans l’étude du jeune enfant. En 1970, le psychologue R. L. FRANTZ met au point une méthode expérimentale qui révolutionne les connaissances sur le monde mental du bébé (méthode portant sur l’étude du temps de fixation du regard comme indicateur de l’intérêt que le bébé porte à la nouveauté). Cette méthode se développe et se perfectionne et aboutit en 1985 à l’expérience sur la permanence de l’objet menée par R. BAILLANGEON, E SPELKE, S WASSERMANN.

La nouvelle psychologie de l’enfant remet en cause, ou tout au moins ne reconnaît pas comme seul possible, le modèle décrit par Piaget comme un développement linéaire et cumulatif, stade après stade. R. SIEGLER instaure un modèle dynamique du développement. Il l’imagine comme « une série de vagues qui se chevauchent, chacune correspondant à un mode de pensée ou une stratégie différente ».

Toutefois, des psychologues du développement contemporains de Piaget, le critiquaient déjà car il ne prenait pas en compte l’environnement. Ainsi, WALLON établissait une approche globale de la personnalité où l’enfant doit s’adapter à un milieu biologique et social. VIGOSTSY lui définissait une théorie avec un ancrage social du développement, le rôle premier du langage, l’apprentissage préalable au développement. Cependant, Piaget n’exclut pas totalement l’environnement social, mais il lui reconnaît qu’une influence marginale dans le développement cognitif.

Par ailleurs, nous avons vu dans la troisième partie de cette fiche le lien entre le langage et la pensée dans les théories de Piaget. En 1975, Piaget et le linguiste Noam Chomsky se sont retrouvés dans un débat organisé à Royaumont afin de confronter leurs théories sur l’acquisition du langage chez l’enfant. Ce débat eu lieu en présence et avec la participation de nombreux chercheurs, linguistes, philosophes, psychologues… (MONOD, FODOR, JACOB, PREMACK, MEHLER…). Ce débat oppose deux conceptions de la genèse et de la pensée du langage : l’innéisme de Chomsky et le constructivisme de Piaget. Pour Chomsky, il existe des capacités mentales innées, inscrites dans le cerveau de l’homme qui expliquent notamment ses capacités linguistiques universelles. Pour Piaget, les capacités cognitives de l’humain ne sont ni totalement innées, ni totalement acquises, mais elles résultent d’une construction progressive où l’expérience et la maturation interne se combinent. Le riche débat se termine alors que chacun est resté sur ses positions, même si Piaget a cherché à trouver des compromis. Toutefois, ce débat n’est toujours pas tranché, il a provoqué une évolution des conceptions concernant le langage et la pensée.

On retrouve aussi plus récemment des Néopiagétiens (R. CASE, K FISCHER…) qui intègrent aux concepts de Piaget des connaissances sur les compétences précoces, sur des conceptions nativistes (pour lesquelles le cerveau est prééquipé à la naissance, chez CHOMSKY par exemple) et sur des sciences cognitives.



IV – CONCLUSION


Ce livre, petit par la taille, est plutôt d’une lecture relativement facile. Paradoxalement comme le précise l’éditeur, « c’est un raccourci saisissant et en même temps une introduction complète à l’œuvre de Piaget ».

L’aspect « raccourci » rend assez difficile la compréhension de certains points importants, sur lesquels sont basés l’ensemble de la théorie de Piaget. Ainsi, les observations qui ont menées aux interprétations et élaboration des concepts sont très peu détaillées dans ce livre. L’absence de ces descriptions ne permet donc pas de comprendre l’élaboration de ces découvertes et quelques fois manquent à la compréhension.
L’aspect « introduction à l’œuvre de Piaget » permet de découvrir une partie importante de l’ensemble de ses découvertes.
Pour l’un comme l’autre de ses points, la lecture d’autres œuvres de Piaget est donc indispensable.

L’épistémologie génétique est très rapidement abordée dans le livre avec l’exemple repris dans cette fiche sur le travail portant sur le temps et la vitesse. On saisit les principes de cette recherche et son apport pour la science mais il me semble indispensable de compléter la lecture par d’autres écrits de Piaget. Malgré les très nombreuses critiques faite aux théories de Piaget, on retrouve ainsi aujourd’hui l’importance de l’étude de l’enfant et la manière dont se construit son psychisme comme la manière façon de comprendre la pensée humaine.

Enfin, les quelques perspectives abordées dans la dernière partie de l’exposé, montrent à quel point d’une part il est indispensable de comprendre le développement mental chez l’enfant décrit par Piaget pour aborder les auteurs contemporains. D’autre part, il faut étudier les avancées de la science des vingt dernières années pour compléter ou contester les théories de Piaget.

Ce livre me semble donc relativement incontournable pour comprendre les recherches de Piaget et les nouvelles théories autours du développement de l’enfant.

lundi 11 juin 2007

FICHE DE LECTURE VIGOTSKY

INTRODUCTION

A la question pourquoi cet ouvrage, je répondrai : nous sommes des êtres de langage au sens large du terme (langage verbal, non verbal et para verbal), alors quel lien existe-t’il entre notre pensée et notre langage ? Notre langage traduit-il notre pensée ? Ou nous sert-il à penser ?


L’AUTEUR

Lev VYGOTSKI, né en 1896 à Orcha en actuel Biélorussie, décédé en 1934 à Moscou des suites de la tuberculose. Il est originaire d’une famille juive aisée et très cultivée. Il mène des études de médecine, de droit, de philosophie, de psychologie, de langues anciennes et modernes mais aussi de littérature.

Il a été marié et a eu avec son épouse deux filles.

En plus d’être très cultivé, il est très actif sur le plan social puisqu’il crée l’Institut Pédagogique de Gomel, un laboratoire de psychologie pour l’étude du jeune enfant. Puis il travaille à l’Institut de Psychologie de Moscou, et crée un laboratoire de psychologie pour l’enfance anomale. En parallèle il contribue à la formation de pédagogues et de psychologues dans les nombreuses universités d’U.R.S.S.

Tous ses travaux ne sont que partiellement publiés et traduits en français. Lecteur assidu de Freud, Piaget, Köhler, Stern et bien d’autres.

Cet auteur est resté longtemps dans l’ombre, à cause de la censure faite en URSS à ses œuvres jugées comme antimarxiste.


SA BIBLIOGRAPHIE

  • Méthodes de recherches réflexologique et psychologique (1924)

  • Psychologie de l’art (thèse, 1925), publiée en français en 2005 (Editions La Dispute, Paris)

  • La conscience comme problème de la psychologie du comportement (article, 1925), publié en français en 2003 dans Conscience, inconscient, émotions (Editions La Dispute, Paris)

  • Psychologie pédagogique (1926)

  • Signification historique de la crise en psychologie (1926), publié en français en 1999 (Éditions Delachaux et Niestlé, Lausanne)

  • Psychisme, conscience, inconscient (article, 1930), publié en français en 2003 dans Conscience, inconscient, émotions (Editions La Dispute, Paris)

  • Histoire du développement des fonctions psychiques supérieures (1930-1931)

  • La théorie des émotions de Spinoza et de Descartes à la lumière de la psycho-neurologie contemporaine (article, 1933)

  • Étude des émotions, publié en français en 1998 sous le titre Théorie des émotions (Éditions L’Harmattan, Paris)

  • Apprentissage et développement à l’âge préscolaire

  • Pensée et langage (synthèse, 1934), publié en français en 1985 (Éditions Sociales, Paris) et en 1997, Éditions La Dispute, Paris, suivi par le Commentaire sur les remarques critiques de Vygotski par Jean Piaget

  • Avec Vygotski (ouvrage collectif sous la direction d'Yves Clot), Editions La Dispute, 2e édition, 2002


« Pensée et Langage » est paru en 1934 à Moscou, cet ouvrage est le dernier de son auteur, il a été achevé sur son lit de mort par la dictée du dernier chapitre.

Cet ouvrage rassemble l’ensemble de son travail sous la forme d’un bilan qui reprend ses théories au travers de son travail expérimental. Il a été publié et traduit aux USA en 1962, et seulement en 1985 en France.


LES THEORIES CLES DE « PENSEE ET LANGAGE »

1/ Le développement intellectuel comme une fonction du groupe humain plus qu’une fonction individuelle.

2/ Théorie historico-culturelle du psychisme. L’intelligence se développe grâce aux outils psychologiques que l’enfant trouve dans son environnement social, notamment le langage qui est l’outil fondamental.

3/ Le mot est médiateur et, est la source de la formation des concepts.

4/ Pour Vygotski le langage « égocentrique » de l’enfant est considéré comme ayant un caractère social puis il se transforme en langage intérieur. Il est le médiateur nécessaire dans le développement et le fonctionnement de la pensée.

5/ Dans un cadre d’apprentissage il énonce la théorie de la zone proximale de développement, qui est en quelque sorte le chemin que l’enfant doit parcourir intellectuellement pour fixer une connaissance et un raisonnement.


L’OUVRAGE

Il m’a paru comme l’œuvre majeure de l’auteur car il y a beaucoup d’intervenant dans la traduction et la diffusion de cet ouvrage. Tout ceci dans le but de vraiment retranscrire la pensée de l’auteur. Il y a un avant-propos d’Yves CLOS (Psychologue du Travail et chargé de la division Psychologie du Travail au sein du CNAM), une présentation de l’auteur, suivi des avertissements de la traductrice Françoise SEVE, ainsi que les commentaires de Jean PIAGET.

Tout au long de son ouvrage L. Vygotski fait référence à J. PIAGET, ou à KHÖLER en intégrant leurs théories à ses expérimentations pour d’une certaine manière les « mettre à l’épreuve » en les confirmant ou en les infirmant. Ce procédé lui permet aussi de démontrer le bien fondé de ses propres théories. Il a une démarche très scientifique.

Cet ouvrage est construit selon une expérimentation avec un postulat de départ qui est : la psychologie moderne identifie et confond le langage et la pensée. A savoir que : soit on avance : le langage et la pensée se développent de manière parallèle mais disjointe, soit ils se développent de manière dissociée.

La question de départ est quel est le rapport interne entre la pensée et le langage ? Pour répondre à cette interrogation l’auteur utilise trois chemins clés : les racines génétiques, le développement des concepts et la place du mot dans la pensée.


RACINES GENETIQUES DE LA PENSEE ET DU LANGAGE

Vygotski annonce clairement qu’il est difficile de démontrer le rapport entre le langage et la pensée. Au travers des études de Khöler sur les singes il va parvenir suite à diverses expérimentations et comparaisons de conclusions, à déterminer :

1/ Le langage et la pensée ont des racines génétiques différentes.

2/ Pour les deux processus il existe un stade pré-intellectuel pour le langage et un stade préverbal pour la pensée.

3/ Les deux processus évoluent de manière parallèle, et en un certain point ils se rejoignent. A ce moment la pensée devient verbale et le langage devient intellectuel

Avant l’âge de 2 ans le développement de l’intelligence et du langage ne suivent pas le même chemin. Les mots utilisés sont ceux de l’entourage, en lien avec des stimuli conditionnés.

A 2 ans l’enfant accède à la fonction symbolique du langage. Il y a une évolution dans la mesure où l’enfant découvre que chaque chose à un nom, et une signification => le langage devient intellectuel. Vygotski avance deux critères à ce langage intellectuel :

  1. Développement du vocabulaire avec les questions sur comment se nomment les choses.

  2. Développement de la réserve de mots.


ETUDE EXPERIMENTALE DU DEVELOPPEMENT DES CONCEPTS

Chez l’enfant comme chez l’adulte il existe une résolution de problèmes liée à la compréhension et à la communication. Le langage est un moyen, seulement la méthode de résolution est différente. Ce qui permet de dire que le processus de résolution est différent.

La motivation de la résolution d’un problème est liée à un but et à un problème mais cela n’est pas suffisant. Donc par quel moyen s’effectue cette opération psychique ? Par l’emploi du signe qui est le moyen fondamental de développement du processus. Dans la formation des concepts, ce signe est le MOT.

Le mot a un rôle et un caractère fonctionnel dans la formation des concepts.

Le développement du concept se réalise selon 3 stades :


Stade 1

Pour le petit enfant le mot est égal à un grand nombre de représentations, il n’y a pas de fixation du mot et la représentation est globale. Le mot de l’enfant se rapporte souvent au même objet que le mot de l’adulte, mais sa signification n’est pas stable.

Stade 2 : la pensée par complexe

Passage à la pensée objective et cohérente autour de la formation du complexe qui est une généralisation d’objets concrets hétérogènes. La liaison entre les objets est liée au fait mais il n’existe pas de lien entre eux.

Il existe 5 formes de complexes dans ce stade qui œuvrent à la formation du concept :

  • Complexe associatif

Liaison entre les objets concrets par ressemblance. Un mot est différent d’un objet, un mot est une famille. (ex : ballon = tout ce qui est rond)

  • Complexe collectif

Compositions hétérogènes, complémentarité mutuelle et réunion en collection. A ce stade chaque objet de la composition est unique. Il y a une généralisation des choses sur la base de leur participation à une opération pratique (ex. vêtements = tout ce qui se porte, vaisselle = l’ensemble des couverts).

  • Complexe en chaine : passage d’un trait distinctif des objets à un autre

  • Complexe diffus : réunion intuitive et concrète d’images ou d’objets via un lien indéterminé et diffus. Lien avec la pensée non intuitive et non pratique. (ex. l’enfant va réaliser des groupes d’objets triangulaires auxquels il ajoute des objets en forme de trapèze qui lui rappelle le triangle moins un de ces sommets).

  • Complexe pseudo concept (âge préscolaire) : extérieurement ce mode de pensée fait appel au concept mais intérieurement l’enfant pense par complexe. (ex. l’enfant va réunir des objets en forme de triangle de n’importe quelle couleur parce qu’il y a une ressemblance mais non pas parce que ces objets ont trois côtés, et trois angles).

Le pseudo concept permet de mesurer les acquis de l’enfant dans le développement de sa pensée et permet l’accès au concept. Il est très présent chez les enfants et ce complexe est d’une difficulté majeure. Pourquoi ? Parce que l’enfant assimile le langage de l’adulte mais ne crée pas ses propres significations. Le langage et le mot servent de médiateur à la communication et à la compréhension mutuelle de l’enfant et de l’adulte. C’est aussi grâce à cette coïncidence que l’enfant pourra accéder à ses propres concepts.

Pour Vygotski le développement est lié au milieu et au génétique.

Stade 3

Comment l’enfant passe-t’il de la pensée par complexe au concept ?

Le concept est une généralisation autour d’une liaison unique et identique pour toutes les circonstances. Le concept ne bouge pas, il fige la pensée. (ex. la photo de famille où on superpose la photo de chacun des membres, ce qui aura pour but de mettre en relief les traits communs des différents membres. Ceux-ci seront un concept au sens propre du terme.) Selon Vygotski il existe deux racines à la formation du concept :

  1. La généralisation

  2. Le jugement (fonction pré intellectuelle)

Pour accéder au concept l’enfant devra autour du mot pouvoir passer du général au particulier et inversement.

C’est à l’âge de l’adolescence que le concept apparaît, et la pensée continue de se développer comme le langage. A cet âge il peut toujours persister une différence entre la conscience du concept et la présence du concept, il existe une différence entre l’action et la verbalisation.

(ex. l’enfant connaît le mot fleur mais pas le nom de toutes les fleurs, par ailleurs il connaît le mot rose mais toutes les fleurs ne sont pas des roses)


PENSEE ET MOT

Pour Vygotski, il n’existe pas de lien à l’origine entre la pensée et le mot. Ils sont le fruit du développement de l’homme.

La signification du mot est un phénomène verbal et un phénomène de pensée car il est une généralisation. Il est un procédé et un acte de pensée qui permet l’accès au concept à partir duquel il y a unité entre le mot et la pensée.

Selon Vygotski, la pensée et le mot s’inscrivent dans un mouvement, une dynamique.

Le langage possède un aspect interne (sémantique) et externe (phonétique). Le développement de l’aspect phonétique se réalise de la partie au tout, du mot à la proposition. Le développement de l’aspect sémantique se réalise du tout vers les parties donc de la proposition vers le mot (ex chez le petit enfant de la phrase monosyllabique ou un mot est l’équivalent d’une phrase). Cette différence de développement est constructive et elle permet à la pensée de se réaliser dans le mot.

Au-delà des mots il existe les prédicats psychologiques, c'est-à-dire la représentation imagée de la phrase qui parfois peut ne pas coïncider avec la forme grammaticale.

Pour Vygotski parler c’est faire le chemin du langage interne vers l’extérieur, et comprendre c’est faire le cheminement inverse.


Qu’est-ce que le langage intérieur ?

Une activité psychologique particulière, une activité verbale particulière. C’est le langage pour soi qui a un processus inverse au langage extériorisé c'est-à-dire qu’il va de l’extérieur vers la pensée.

Vygotski annonce que le langage égocentrique a une valeur sociale et représente un certain stade avant le langage intérieur, il est la porte ouverte au langage intérieur. Ce changement se réalise à l’âge de la scolarisation.

Pour le langage intérieur les prédicats sont absolus car nous nous connaissons nous-mêmes, nous sommes dans notre contexte, nous maitrisons notre environnement intérieur, nous savons toujours de quoi nous parlons et ce que nous ressentons. Nous connaissons le sens que nous donnons à chaque mot et ce langage n’est intelligible que de nous-mêmes.

La fonction du langage intérieur n’est pas la communication.


Comment passer de la pensée au langage ?

Ce passage est complexe car derrière la pensée il y une tendance affective et volontaire, UNE MOTIVATION. L’auteur fait une analogie avec le ciel en indiquant que le vent est la motivation, la pensée les nuages et la pluie le langage. Les trois éléments ont des relations complexes entre eux mais sont nécessaires.

La pensée verbale est un tout dynamique. C'est-à-dire que l’on commence par le motif qui déclenche la pensée, sa mise en forme, son transfert dans les mots, puis dans leur signification et enfin dans la parole.

Le mot est la clé du développement de la pensée et du langage qui sont eux-mêmes le reflet de la conscience humaine : « La conscience se reflète dans le mot comme le soleil dans une petite goutte d’eau ».


LA ZONE PROXIMALE DE DEVELOPPEMENT

Toute une partie de l’ouvrage est consacrée à la comparaison de la construction des concepts quotidiens (liés à la vie de tous les jours de l’enfant) et celle des concepts scientifiques (liés aux apprentissages scolaires). Vygotski constate que ces deux concepts se développent de manière différente, mais ils se font évoluer mutuellement. Piaget n’a jamais étudié cette comparaison car il n’était pas intéressé par le rapport entre apprentissage et développement.

Pourquoi ? Parce que parfois l’acquisition d’un concept scientifique permettra d’apporter des informations et des résolutions qui ne sont pas possibles dans le concept quotidien car le degré de développement n’est pas encore atteint dans ce dernier concept.


Quelles sont les différences entre le concept scientifique et le concept quotidien ?

  • Le concept scientifique n’a pas de rapport avec l’expérience de l’enfant

  • La base de développement de ces deux concepts est différente (le concept quotidien s’appuie sur du connu et pas le concept scientifique)


La prise de conscience du concept ?

Vygotski démontre que plus un concept est employé de manière automatique plus il est difficile d’en prendre conscience. Par exemple un enfant peut utiliser couramment la relation causale dans son langage avec la préposition « parce que », mais ne peut pas l’expliquer. Pour en prendre conscience l’enfant doit posséder la perception et la mémoire et grâce à l’attention il pourra en prendre conscience. Un autre facteur est important pour l’accès à cette prise de conscience c’est la motivation dans l’apprentissage. L’accès à cette conscientisation permet de créer des fonctions psychiques supérieures.

Le développement et l’apprentissage évoluent en corrélation mais pas en parallèle. On peut mesurer le développement d’un apprentissage entre l’état du développement présent (ce que l’enfant peut apprendre seul) et l’état de développement futur (ce que l’enfant peut apprendre grâce à l’étayage du maitre). La zone de développement entre ces deux états est la zone proximale de développement.

Cette zone est très significative pour la dynamique du développement intellectuel et la réussite de l’apprentissage.


CONCLUSION

J’ai trouvé dans ce livre les réponses à mes questions de départ, à savoir qu’il existe un lien clair et réciproque entre notre pensée et notre langage. J’ai même découvert des réponses inattendues. Ayant moi-même des enfants je comprends mieux les difficultés qu’ils peuvent avoir dans leurs apprentissages scolaires. La découverte la plus significative pour moi est que l’utilisation et la prise de conscience d’un concept n’est pas la même chose, ils ne correspondent pas au même degré de développement et d’acquisition. Je constate que l’apprentissage scolaire est vraiment une construction pas à pas.

L’auteur reste large dans ses classes d’âges (âge préscolaire, âge scolaire, adolescence), par rapport à Piaget qui a fait preuve d’une précision extrême pour chaque étape du développement. Vygotski le reconnait lui-même. Aussi le fait que le développement ne soit pas une chose figée, et qu’il soit présent tout au long de notre vie, donne une ouverture et un optimisme sur l’évolution ou les phases de développement encore possibles à l’âge adulte.

Ce qui me semble bon de retenir c’est le fait qu’il existe une interaction avec le milieu social, que le langage est un moteur pour le développement de la pensée, et que sa théorie de la zone proximale de développement est toujours prise en compte dans l’enseignement aujourd’hui.

Un dernier point pour conclure, Vygotski n’a été connu « du monde » que très tardivement en lien avec l’histoire de l’URSS. Par contre lui, a beaucoup lu les œuvres des autres auteurs de l’époque, ce qui lui a servi dans l’évolution et l’élaboration de ses propres théories. En ayant été connu plus tôt, aurait-il permis à ces autres théoriciens de l’époque une orientation différente dans leurs propres théories ?

cours du 08/06/2007_ Hélène

LES OPERATIONS FORMELLES

Opérations formelles car elles utilisent la forme pour se développer et non pas le contenu.

Période : de 11/12 ans → 16/17 ans

Avec 2 sous stades :
- Opérations pré-formelles : 11/12 ans → 13/14 ans
- Stade d’équilibre des opérations formelles 13/14 ans → 16/17 ans

1) OPERATIONS PRE-FORMELLES

Présentent 2 propriétés

1ère propriété :
Possibilité pour l’enfant d’appliquer les groupements des opérations concrètes (sériation, classification, groupement multiplicatif…) sur un contenu abstrait.

Correspond à l’école au passage de l’apprentissage des équations au 1er degré jusqu’aux opérations à plusieurs degrés (en 4ème), ou à la complexification de l’apprentissage grammatical.

Sériation de sériation : on travaille sur la logique des propositions.
Ex : Edith est plus brune que Lili. Lili est moins blonde que Julie. Qui est la plus blonde ?


2ème propriété :
Utilisation des opérations formelles dans les cas les plus simples sans généraliser.

Permet d’accéder au stade d’équilibre des opérations formelles

2) OPERATIONS FORMELLES

Deux caractéristiques fondamentales :
- Une pensée hypothético-déductive
- Opération à la seconde puissance

Pensée hypothético-déductive
Pensée qui opère une inversion entre le réel et le possible.
Le réel se subordonne au possible. La déduction ne se fait plus sur le réel mais sur des hypothèses.
Ex : raisonnement scientifiques et raisonnement philosophique

Il faut d’abord se soucier de la validité logique de l’énoncé.
Porte donc sur des énoncés et non sur des objets.
La logique des propositions se substitue donc à la logique des classes et des relations qui portaient sur les objets (dans le stade des opérations concrètes).

On combine donc en insérant le réel dans l’ensemble des hypothèses possibles, compatibles avec les données.
Le raisonnement est combinatoire, c'est-à-dire qui se soucie de l’enchaînement logique des propositions pour en tirer des conclusions sur leur vérité ou leur fausseté.

Cette combinaison, appelée de n à n (c'est-à-dire de tant de proposition à tant de propositions), va donc correspondre à des classifications de classifications. On va enchâsser des classifications logiques les unes dans les autres jusqu’à avoir un énoncé logique.
On va multiplier les possibilités pour développer le raisonnement donc on appelle à la deuxième puissance (sériation de sériation, ou classification de classification).

Définition de pensée hypothético-déductive = un évènement particulier n’est que l’accomplissement des éventualités parmi toutes celles que la situation permet. L’évènement fortuit est l’actualisation d’une seule de ces possibilités.

Raisonnement sur des cas de figures
Raisonnement combinatoire
Importance du facteur temps, mettre des scénarios en jeu avec des temporalités différentes.
Ex en entreprise : Stratégie
« si mon concurrent développe telle domaine et si moi je développe tel autre domaine, alors… »
Autres exemple : Relations internationales

Le raisonnement combinatoire repose sur 4 opérations :
- L’implication : Si la proposition P est exacte alors la proposition Q est exacte aussi
- La disjonction : P ou Q ou les deux ensembles sont vraies
- La conjonction : P et Q sont liées
- L’incompatibilité : P ou Q ou aucune des deux

Pour Piaget, les propositions combinatoires se décomposent en 16 propositions :


1) NEGATION ABSOLUE :
0 = 0

2) CONJONCTION
P.Q = P.Q
Le « . » signifie et

CONTRADICTIONS AU TRAVAIL DE PIAGET

5 niveaux de découverte depuis les années 80 :
fonctionnement du cerveau
Développement précoce : (ex : tests sur les bébés)
Théorie évolutionniste : l’intelligence se développe par adaptation et évlolution permanente (ex : Stern)
Intelligence sociale (Wallon, Vigotsky….) : théoriciens des interactions sociales : langage et rapport entre l’intelligence et le langage.
Néo-piagétiens : amendent Piaget sur les stratégies d’inhibitions chez l’enfant. L’intelligence se développe par des vagues successives qui se combinent. Développement tout au long de la vie : des raisonnements de l’enfant perdurent chez l’adulte et des raisonnements de l’adulte apparaissent plus tard. Travail de maturation et non pas seulement accumulation

cours du 04/06/2007 _ Hélène

MISE EN PLACE DES OPERATIONS CONCRETES

Dès l’âge de 7 ans, l’enfant acquiert la réversibilité logique qui lui permet une décentration et une mobilité de la pensée.

La réversibilité :
Propriété des actions du sujet qui sont susceptibles de s’exercer en pensée et qui peuvent être annulées en pensée par une action orientée en sens inverse.

Une telle opération est possible car vont exister pour l’enfant des invariants.
Invariants : une propriété qui reste constante malgré la transformation que fait subir une opération à un objet ou une situation.
Ex : une opération qui transforme un état A en un état B peut s’opérer en sens inverse, c'est-à-dire un retour possible de B en état A en annulant la transformation.
La réversibilité est donc la possibilité de garder un invariant malgré le changement.
Cet invariant va constituer un schème de conservation.

NOTIONS DE CONSERVATION

Les notions de conservation ne sont pas toutes élaborées dans le même temps, ni dans le même rythme. On peut donc les répertorier et les classer les par âge.

Ces conservations s’effectuent par secteurs selon un ordre d’apparation qui constitue une succession temporelle :

A 7 ans, conservation des
- Longueurs
- Surfaces
- Equivalences quantitatives

Entre 7 et 8 ans : conservation des substances

Entre 8 et 9 ans : conservation
- Du poids
- Des volumes spatiaux
- Des verticales et des horizontales

A 11-12 ans : conservation du volume (au sens physique du terme)

Conservation des substances :
Expérience : On donne à un enfant deux boules de pâte à modeler.
On lui fait constater que les boules sont identiques et qu’il y a la même quantité dans l’une et dans l’autre.
On prend la boule B (en laissant la boule A dans son état) pour la transformer en une galette
On demande à l’enfant si il y a la même quantité, si elles sont identiques

Avant 7 ans, l’enfant va dire qu’elles ne sont pas identiques. Il déduit de l’apparence de la transformation. La transformation de la forme ne laisse pas invariante la même quantité de matière ou de substance.
Lorsque la conservation de la quantité de substance est affirmée au-delà de la transformation constatée, l’enfant accède, dans la transformation de la boule B en référence à la boule témoin A, à 3 types de réversibilité :
- Identité : c’est la même chose
- Compensation : c’est plus large mais c’est plus mince
- Inversion : si on refaisait la boule, on aurait la même chose qu’avant

Dans la construction de la conservation de substance, l’argument de la configuration perceptive (= l’apparence) n’est plus prégnant.
Ce que l’enfant de 7-8 ans observe, c’est au-delà de l’apparence, la possibilité de lier la déformation à la transformation.

Cette conservation de la substance va aller de pair avec la conservation du poids :
On va prendre à nouveau les 2 mêmes boules. On va les mettre sur les 2 plateaux d’une balance. Après avoir constaté l’égalité des deux plateaux, on déforme la boule A en galette mais on ne la repose pas sur le plateau. On demande à l’enfant ce qui se passerait si on la mettait sur le plateau.
Avant 7 ans, l’enfant va penser qu’elle serait plus lourde car plus étalée.
Alors qu’ils vont affirmer qu’elle sera égale quand ils auront déduits que la transformation de la forme n’aura pas d’incidence sur le poids.

Conservation des longueurs
Deux baguettes de même longueur placée en position horizontale et parallèle avec un écart de 5 cm entre les deux.
On fait constater à l’enfant l’égalité des deux baguettes.
On décale une baguette par rapport à l’autre en demandant à l’enfant si elles ont la même longueur.
On les décale une fois à droite, une fois à gauche.

Autre expérience :
On dépose une baguette de 16 cm et 4 baguettes de 4 cm chacune ;
On place devant l’enfant la baguette de 16 cm et parallèlement les 4 petites baguettes juxtaposées.
On fait constater l’égalité des longueurs.
Puis on dépose les 4 petites baguettes en une ligne brisée
On demande à l’enfant si les deux configurations ont la même longueur.

Avant 7 ans, l’enfant pense que la longueur des petites baguettes est plus petite que la grande
Après 7 ans, pense que la longueur n’a pas bougé.
La conservation des longueurs va supposer la constitution de l’espace comme cadre, contenant des objets où se conservent des distances : il y a un invariant de l’espace.

Conservation numérique :
Repose sur la mise en correspondance terme à terme
Expérience :
On prend 9 coquetiers et 12 œufs.
On demande à l’enfant de réaliser une correspondance exacte entre les œufs et les coquetiers.
En laissant les coquetiers en ligne, on serre les œufs en les approchant les uns des autres et on demande à l’enfant si il y a toujours la même chose d’œufs que de coquetiers. On lui demande ce qui se passerait si on mettait les œufs comme avant.
On laisse les œufs en place, on espace les coquetiers.
On va avoir 3 formes de réponses :
- La comparaison est qualitative et globale mais sans correspondance terme à terme (lien entre 2 choses qui vont ensemble) ni équivalence durable
- La correspondance terme à terme s’effectue mais elle est intuitive et non durable
- La correspondance est opératoire, qualitative et numérique

Dans cette expérience on cherche la manière dont les enfants après 7 ans peuvent établir comme lien entre des objets, sans être fasciné ou en tout cas dirigé
- par l’apparence,
- par une évaluation globale fondée sur la correspondance figurale
- par la configuration ou les qualités de forme, de couleurs

Quelque soit la disposition, l’espacement, l’enfant peut établir une correspondance terme à terme, ce qui ne signifie pas la notion de nombre mais qu’il peut établir une équivalence entre deux ensembles qui présentent la même quantité globale.

La correspondance intuitive est fondée sur un aspect quantitatif va à partir de 7 ans devenir une conservation de types opératoires dès que la reconnaissance de l’équivalence se maintient quelque soit les déformations figurales que l’on opère.

La conservation est opératoire car elle repose sur la constitution d’un invariant, ce qui signifie que quelque soit les transformations opérées, une propriété et au moins une seule n’est pas altérée.
Ces conservations (de volume, de longueur…) vont préparer l’enfant à :
- la notion de classement,
- la notion de collection figurale

COLLECTIONS FIGURALES (5-6 ans)

L’enfant qui a classé des formes géométriques : c’est l’idée de regrouper les objets selon leurs équivalences.
Effectuer une classification : grouper les objets selon leurs critères communs.

La classification la plus simple apparaît comme une suite linéaire d’emboîtement.
Ex : les chiens font partis des animaux, qui font partis des êtres vivants.
Il y a donc plusieurs structures de classe qui s’organisent en groupement.

L’enfant va apprendre à classer les formes géométriques en mettant ensemble celles qui sont parallèles.
On commence par des alignements de carrés, de rectangles.
Les alignements :
- se font par un critère de ressemblance
- ne sont pas structurés selon un plan

Dans le 2ème temps de l’expérience : les alignements vont faire apparaître un changement de critère.
Ex : 1 carré bleu, un triangle bleu, un rond bleu
On passe à un 2ème critère, la forme par exemple.

Ensuite on va lui demander de constituer les carrés en 1 ensemble de carrés, les triangles en un grand triangle.
On lui demande de faire une maison avec les carrés et les triangles
Il va apprendre à collectionner les formes pour faire un ensemble complexe de plusieurs formes.

Collections figurales : collections qu’il peut mettre en place à partir de formes géométriques :
- par assimilation successive
- par constitution de ressemblances et de différences

ce qui lui permet d’accéder à la notion de compréhension et extension en mettant les mêmes avec les mêmes.
La notion de compréhension (un ensemble qui contient des parties) détermine l’extension.
En ajoutant un élément, l’extension (positive ou négative, on enlève ou on ajoute un morceau) détermine la compréhension.

L’enfant apprend ainsi à manipuler des collections pour constituer des objets totaux dont il peut dissocier ou réajuster des parties selon les configurations perceptives.

Les collections figurales vont laisser la place aux collections non figurales.
Portent sur des objets à forme géométrique, les enfants vont procéder par des rapprochement de forme.
Ils vont ensemble progressivement intégrer un principe quantificateur pour coordonner les formes entre elles pour intégrer des inclusions de classes. C'est-à-dire la demande de réversibilité ou les tous et les quelques uns permettront de constituer des opérations où :
B = A + A’
Et son inverse
A = B – A’

L’enfant va comprendre que l’on joue sur autre chose que la configuration perceptive

A 7 – 8 ans, l’enfant va construire d’emblée des classifications hiérarchiques :
- en combinant de façon mobile des procédés ascendants et descendants
- en quantifiant l’inclusion
Par exemple on dispose 20 cartes dont 4 d’entre elles comportent des objets coloriés et les 16 autres avec des fleurs. Parmi les fleurs, 8 primevères dont 4 jaunes et les autres de couleurs différentes.
On va faire procéder à l’enfant des emboîtements inclusifs où on fait rentrer les primevères jaunes dans la classe des primevères, ces primevères dans la classe des fleurs, ces fleurs dans la classe des objets. Il va procéder à ces types de classement en mettant les primevères dans la classe des fleurs….
Seulement à 8 ans, car avant cet âge l’enfant ne parvient pas au groupement additif. Il ne peut comparer les objets les uns avec les autres pour constituer des classes qui s’incluent les uns des autres.
L’inclusion nécessite la combinaison entre extension et compréhension.

Cette classification donne la possibilité d’accéder aux sériations : regroupement des objets selon leurs différences ordonnées
C'est-à-dire la possibilité pour l’enfant de discriminer ce qui relève de la perception et des opérations proprement dites.

Expérience : on donne à l’enfant 10 petites réglettes de 9 à 16 cm. On lui demande de fabriquer un escalier en partant de la petite réglette.
On décrit 3 stades :
- l’enfant échoue à la sériation de 10 éléments. Il va procéder par série de 3 ou 4 ou par couples
- l’enfant réussit la sériation par un tâtonnement empirique et ne parvient pas à constituer l’ensemble
- l’enfant utilise un méthode systématique qui consiste à chercher le plus élément puis le plus petit de ce qui reste…

Seule la méthode qui consiste à isoler un élément dans son rapport à l’élément le plus grand permet à l’enfant d’accéder à la réversibilité opératoire et lui permet donc sans tâtonnement de pouvoir combiner et donc d’anticiper l’ordre de placement des réglettes. L’anticipation est un élément permis par la combinaison de réversibilité, c'est-à-dire la capacité de l’enfant à pouvoir faire l’opération dans un sens et en sens inverse.

Dans ces sériations l’enfant réalise ce qui va lui permettre d’accéder aux groupements multiplicatifs = capacité de l’enfant de pouvoir combiner plusieurs classifications et plusieurs sériations.
C'est-à-dire de pouvoir à la fois prendre en compte le nombre, la couleur, la forme d’objets différents en les appareillant selon des critères différents et en les combinant dans des rapprochements et des places qui permettent de constituer des liens, qui, par extension et de proche en proche vont s’étendre.

Les opérations concrètes permettent à l’enfant d’acquérir le nombre. Le nombre se construit de manière opératoire par des opérations d’épreuves de correspondances en écartant les qualités c'est-à-dire les différences entre les éléments, pour n’admettre que les équivalences entre ceux-ci.

L’énumération : le fait de ne retenir qu’une seule propriété c'est-à-dire des éléments équivalents qui permettent à l’enfant de les considérer l’un après l’autre
- dans le temps (en les rangeant l’un après l’autre)
- dans l’espace (en les rangeant l’un à côté de l’autre)

Avec l’abstraction (c'est-à-dire écarter les qualités) on assiste à une fusion de deux systèmes de classes ou deux systèmes de relation en aboutissant à un seul système : les nombres natures.

Le nombre suppose donc une synthèse puisque :
- 1°) il retient des classes leur structure d’inclusion (1 est inclus dans 2, 2 est inclus dans 3….)
- 2°) il fait abstraction des qualités pour transformer les objets en 1 unité. Il fait intervenir un ordre serial : c'est-à-dire une distinction entre une unité et la suivante.

C’est la synthèse de cet ordre serial des unités avec l’inclusion des ensembles qui résultent de leur réunion qui constituent les nombres
1 est inclus dans 1 + 1
1 + 1 est inclus dans 1 + 1 + 1

Le nombre est donc un groupe logique qui va permettre à l’enfant d’accéder à des actions en pensée et réversibles, c'est-à-dire des transformations qui permettent que quelque chose se conserve malgré ce qui se transforme.
Ces conservations sont solidaires des transformations qui sont régies par des structures logiques.
Ces structures logiques obéissent aux propriétés de groupement, par exemple les groupements additifs, multiplicatifs.
Ces groupements additifs, multiplicatifs peuvent se produire grâce à la réversibilité par invention, par réciprocité, qui constitue les modes d’inclusion que le nombre va pouvoir représenter.